Un ouragan a balayé le Temple


Un ouragan a balayé le Temple !


Nul ne le nie. Certainement pas le quinzième abbé de Cambron : Yves de Lessines. 


C'était le 13 octobre 1307, un vendredi...


A l'aube, le Roi de France, Philippe le Bel, a fait procéder à l'arrestation de tous les chevaliers de l'Ordre du Temple, ces moines-soldats qu'on appelait communément « les Templiers ». Où qu'ils se trouvent, ils furent interpellés par ses baillis et ses sénéchaux.


Interrogés avec la plus grande brutalité sous la conduite des inquisiteurs ecclésiastiques, ils ont livré une série d'aveux sous la torture.


Gardés dans les prisons royales, ils ont attendu...


Pendant ce temps, le roi, le pape et les aristocrates ont tout pillé.


Le reste, des terres grevées de dettes, a été cédé à l'Ordre de l'Hôpital, qui deviendra plus tard l'Ordre de Rhodes, puis l'Ordre de Malte.


Toutefois, Yves de Lessines raconte une histoire différente. Certes, les terres et les bâtiments avaient été saisis, mais les putois n'eurent pas tout, dit-il...


En 1229, l'Empereur romain et germanique, Frédéric II de Hohenstaufen, s'était déjà attaqué à l'Ordre du Temple, dans son Royaume de Sicile. Tirant la leçon de cette douloureuse expérience, les Templiers ont institué une procédure secrète, à l'intérieur de l'Ordre du Temple, en vue de permettre sa survie en cas de coup dur…


C’est ce qui a permis, en 1307, à un chevalier presque anonyme de faire rassembler et abriter, quelques semaines avant la catastrophe, les moyens de permettre à l'Ordre du Temple de reprendre ses activités, après ce qu’il croyait n’être qu’une bourrasque.


C'était un templier hennuyer affecté à la maison templière flamande d'Ypres, la plus ancienne et la plus riche de toutes les maisons templières : « La mère de l'Ordre en Occident.


Ce trésor, c'était d’abord ce qui représentant une véritable fortune au moyen-âge : les saintes reliques. C’était ensuite les documents les plus significatifs des archives de l’Ordre du Temple, à savoir, sans doute, l'original de la règle, qui avait été composé à Jérusalem, car le deuxième exemplaire se trouvait à la maison d'Ypres : il repose actuellement à la bibliothèque de Bruges, ainsi que les décisions des chapitres et plusieurs écrits qui prouvaient que l'Ordre du Temple était trahi par les papes depuis des dizaines d'années. C’était encore quelques objets de culte.  C’était enfin un peu de la monnaie, rien de fabuleux, pas un chariot, ni même une brouette, quelques poignées tout au plus…


Dans un extraordinaire poème, Yves de Lessines raconte, dans le style de l'énigme, cette épopée dont les dernières étapes furent, d’abord, la Maison de Saint-Léger, ensuite, le Village de Moustier, et, enfin, le Hameau de « La Pierre », situé à l’extrémité du Village de Wodecq, de part et d’autre de l’ancienne chaussée romaine partant de Bavay, dans le Pays des Collines. Ce dernier regroupait à cette époque un ensemble de territoires dont le statut juridique était contesté à la fois par les Flamands et par les Hennuyers : Les Terres des débats.


Pendant des années, Rudy Cambier, un enfant du pays, passionné de vieux textes, dont la langue maternelle est le picard parlé entre la Dendre et l’Escaut, a ruminé jour après jour le texte d’Yves de Lessines. Au fil de plusieurs millieurs de pages de notes prises à la bibliothèque nationale, il en a fait une analyse philologique rigoureuse, mot après mot, à partir des meilleurs dictionnaires d’études médiévales, en comparant les différentes éditions disponibles.


En 2000, il a exposé sa méthode et les résultats de ses recherches sous une forme accessible pour le grand public, dans un livre au style pour le moins original : « Le dernier templier. Tome 1. Le Chemin du Vieux Moine ». Cet ouvrage a été republié en 2010 par les Editions Louise Courteau (Québecq), sous le titre : « L’œuvre du vieux moine. Tome 1. Le Dernier Chemin des Templiers ». Entre temps, il avait été traduit en néerlandais : « Nostradamus en de erfenis van de Tempeliers » (2002), en anglais : « Nostradamus and the Lost Templar Legacy » (2003) et en italien  : « Nostradamus e il segreto dei Templari » (2004).


Sortant des sentiers battus de l’académisme universitaire, Rudy Cambier  raconte la fin de l’Ordre du Temple selon Yves de Lessines


Trois hommes connurent le secret.


Au début, tout se passa comme prévu : Philippe le Bel ne trouva pas ce qu’il cherchait en réalité : les saintes reliques de l’Ordre du Temple. Mais la suite ne se produisit pas du tout suivant leurs plans.


Le fait le plus inattendu est le mode opératoire du roi : il ne s’en prit pas à l’Ordre du Temple, mais il s'attaqua à ses hommes et à ses biens : la moitié des chevaliers mourut sous la torture et les autres furent dispersés ; en définitive, le pape supprima l’Ordre du Temple "provisoirement", pour ne pas devoir restituer les quantités énormes de biens templiers que, pour prendre le roi de court, il avait tout de suite mis en possession de ses favoris, ses neveux et son fils adultérin…


Quelques années plus tard, le très vieux prieur de l’Abbaye de Cambron, Yves de Lessines, est le seul survivant des « triumvirs ». Il attend toujours celui qu’ils avaient espéré, un homme susceptible de restaurer l'Ordre du Temple, celui qu'il nomme « l'attendu ».


Désespérant de rencontrer cet homme de son vivant, sans cesse remué par un secret qu’il ne peut communiquer et que, cependant, il doit transmettre, car l’attendu doit trouver la sauvegarde,  il imagine une ruse fabuleuse : il va tout mettre par écrit, mais dans une forme telle qu’aucun mortel ne pourra la déchiffrer, sauf celui dont le destin est de faire renaître l’Ordre du Temple. A cet attendu, le moment venu, quand il aura fait ses preuves dans les épreuves, l’Esprit-Saint donnera l’intelligence qui lui permettra de tout comprendre et de tout accomplir, à l’instar des langues de feu dont la fulgurance avait illuminé les apôtres lors de la Pentecôte.


Ainsi Yves de Lessines écrit-il son poème, un texte composé de 4000 vers décasyllabiques, découpés en 1000 quatrains répartis en 10 séries de 100 quatrains, d’où son nom : « Les Centuries ».


Dans cette oeuvre extraordinaire, il révèle les chemins suivis et le chemin à suivre. Les premiers décrivent les routes suivies pour acheminer le trésor jusqu’à sa cachette : le « Blanc Scourchet » ; le dernier montre la route à suivre par l’attendu pour s’y rendre. En fin de compte, sous le couvert de multiples anecdotes historiques, les Centuries, ce poème si mystérieux, ce n’est que ça, un ensemble d’itinéraires : les derniers chemins templiers. A cette époque, les voyageurs ne disposent pas de cartes : ils demandent leur route d’un lieu à l’autre. Ainsi, les itinéraires sont-ils une suite de toponymes qui se font plus nombreux à mesure qu’on se rapproche du but du voyage…


Depuis plus de 700 ans, bien de l'eau a coulé sur la terre et sous les ponts : le monde a changé. Pour retrouver les itinéraires cachés dans les admirables paysages du Pays des Collines, il faut consulter les cartes anciennes et il faut marcher : le chemin est devant nous, mais il est aussi en nous... Telle est la leçon du moine cistercien et du templier flamand : il faut suivre un itinéraire. Il est bien réel, il se déroule sous nos pas, il suit le creux de nos vallons et la crête de nos collines, mais c’est aussi un voyage à l’intérieur de nous-mêmes : il est en nous. Aussi les Centuries nous conduisent-elles sur un chemin initiatique…